L’écrivain tout court

Image : Pearson Scott Foresman – Archives of Pearson Scott Foresman, donated to the Wikimedia Foundation, Public Domain, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=3592645

Cingler la langue, la faire bruisser, grimacer – la faire gémir, la faire pleurer.

Une langue hachurée, striée, pourfendue ; une langue ouverte, déchirée. Une telle langue, défigurée sous les coups, méconnaissable à force de violence, sera reconnue, finalement, par ceux-là seuls qui savent l’aimer.

Quelle est donc cette bêtise que celle de l’écrivain « francophone » ? Quelle est donc cette connerie que celle d’un écrivain qui « parle » une langue – qui avec maladresse s’efforce d’associer certains sens à certains phonèmes, qui en déchiffre difficultueusement le signe, la « signification » ?

L’écrivain ne parle pas. Il déchire, il craquèle, il viole – il crée.

L’écrivain n’est pas celui à qui on a appris la langue – tel un éternel petit écolier que l’on surveille scrupuleusement, de peur, ou plutôt c’est précisément là ce que l’on attend, qu’il bégaye sa leçon. L’écrivain c’est celui qui fait apprendre la langue, qui la révèle à elle-même, qui lui fait éructer ce qu’elle avait en elle d’insoupçonné.

Être écrivain et puis c’est tout – c’est manifester en soi l’universel en travail, c’est substituer la singularité à la particularité jalouse et sectaire, pour qu’en chaque interstice d’un monde monadique se reflètent tous les mondes, possibles et impossibles. Être écrivain, tout court, un point c’est tout. Or fuck you.

Par Médrick Varies

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